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L’agroforesterie, un avenir durable pour le café

Nous relayons ici un article du CIRAD sur un projet européen, Breedcafs, déployé notamment au Cameroun. Ce projet s’est employé pendant les 4 dernières années à mener des recherches sur l’amélioration des variétés, des techniques culturales et l’évaluation des performances de la caféiculture en agroforesterie.

Depuis une vingtaine d’années, le Cirad et son partenaire suisse Ecom travaillent à la création de variétés hybrides d’Arabica productives, adaptées à la fois à la culture sous ombrage et plus résilientes aux stress environnementaux. Et donc adaptées aux petites exploitations conduites en agroforesterie avec peu d’intrants.

Pour connaitre leurs performances au champ et la qualité du café produit, ces variétés hybrides ont été testées à grande échelle directement chez des petits planteurs dans le cadre du projet Breedcafs (BREEDing Coffee for AgroForestry systems), coordonné par le Cirad, financé par le programme européen H2020 et mis en œuvre avec de nombreux partenaires (Cirad (coordinateur), Illy Caffe Italy, Eurofins, Arvid Nordquist, Université de Copenhague, Galway University, IRD, Lisboa University, Université de Montpellier, Nova ID FCT, Max Planck, Forschungszentrum Julich GMBH Germany, NOMAFSI, AGI, IRAD, Université d’Arizona,, WRC, Nicafrance Foundation et SNV).

Breedcafs Caféiers en agroforesterie © B. Bertrand

Résultat, ces nouvelles variétés sont 10 à 20 % plus productives que les variétés traditionnellement cultivées. Leurs résistances aux maladies permettent de réduire de 15 à 20 % le recours aux pesticides et, cerise sur le gâteau, elles sont meilleures à la tasse. « C’est un succès à tous les niveaux » se réjouit Hervé Étienne, chercheur au Cirad et co-coordinateur de Breedcafs.

La filière café menacée par le changement climatique

La filière café est extrêmement vulnérable face au réchauffement. Du moins telle qu’elle existe aujourd’hui : des caféiers Arabica génétiquement tous semblables, cultivés majoritairement en plein soleil et particulièrement sensibles aux hausses de températures et aux maladies qui accompagnent le changement climatique. Pour les scientifiques du Cirad, planter du café – arbuste ombrophile originaire des forêts éthiopiennes - sous des arbres est la meilleure voie d’adaptation de la production au changement climatique.

Des expérimentations à 360 degrés

Pendant 4 ans, les équipes du projet ont caractérisé les mécanismes d’adaptation de ces nouvelles variétés de café sous différents facteurs de stress (températures élevées, sécheresse, ombrage, atmosphère enrichie en CO2, faible nutrition azotée…). Ces expérimentations ont été réalisées en chambres climatiques, sous serres, au Portugal, au Danemark, en France, mais aussi directement à la ferme sur plus de 100 exploitations au Costa Rica, Nicaragua, Vietnam et Cameroun. Elles ont permis d’obtenir une caractérisation hyper détaillée de ces hybrides F1 aux noms de Starmaya, CentroAmericano, Evaluna et Mundo Maya.

Des résultats prometteurs pour les cultivateurs

Que ce soit au Vietnam, au Cameroun, au Costa Rica ou au Nicaragua, les résultats indiquent des gains de productivité de ces hybrides F1 allant de 10 à 20 %. Et leurs résistances aux maladies permettent de réduire de 15 à 20 % l’utilisation de pesticides.

Les scientifiques prévoient qu’avec une diffusion rapide de ces hybrides, la superficie de caféiers cultivés en systèmes agroforestiers pourrait augmenter de 30 à 40 % dans les dix ans à venir. Benoit Bertrand, sélectionneur au Cirad et coordinateur du projet, cultive l’espoir qu’ « avec le succès de ces variétés dans les quatre pays du projet, plusieurs pays voisins adopteront massivement les nouveaux hybrides F1 et les systèmes agroforestiers sur les trois continents ».

Les clusters agroforestiers, une innovation organisationnelle qui porte ses fruits

Cultures en agroforesterie, bons terroirs, caféiers hybrides hautement productifs et de grande qualité organoleptique, chaine de valeur locale orchestrée par des parties prenantes interconnectées et meilleure répartition de la plus-value, au bénéfice des producteurs. Voilà les piliers du concept de cluster agroforestier conçu au Cirad et développé dans le cadre de Breedcafs.

Ce nouveau concept cumule les avantages : il permet un approvisionnement en café de qualité, 100 % traçable, issu de l’agroforesterie, payé aux producteurs au juste prix et neutre en carbone.

Pour Benoît Bertrand, « ces clusters pourraient bien se multiplier dans les années à venir, car avec l’augmentation des prix du café, il devient hautement stratégique pour les industriels d’assurer des relations de confiance avec les producteurs pour mieux s’assurer de la qualité du produit et garantir des pratiques culturales durables pour l’environnement ».

Des méthodologies et des outils de référence

Une métabase de données recense toutes les performances agronomiques, les données biochimiques, physiologiques et moléculaires des différentes variétés cultivées dans tous les essais, en conditions réelles ou contrôlées et sous différents types de climats et de stress.
Cette base de données et les puissants outils statistiques associés sont sans précédent dans le secteur du café et pourraient démontrer leurs utilités au-delà même du projet, dans les communautés scientifiques travaillant sur le café ou d’autres plantes pérennes tropicales.

Des données cruciales pour les sélectionneurs

Breedcafs a révélé le réservoir génétique inexploité que représentent les variétés sauvages pour la sélection d’Arabica, en prouvant les performances agronomiques et la qualité à la tasse de variétés hybrides F1 issues de parents éthiopiens.

D’un point de vue gustatif, le projet Breedcafs a également établi que les grandes différences de qualité à la tasse sont surtout perceptibles quand le café est cultivé en altitude. Une information très importante pour les stratégies de sélection de profils sensoriels exceptionnels et nouveaux.

Le projet a permis aussi de développer des outils et méthodes pour identifier les gènes adaptés aux systèmes agroforestiers. Ces instruments facilitent les stratégies de sélection et sont facilement transposables à d’autres cultures d’arbres fruitiers.

Le projet a également amélioré la compréhension des caractéristiques culturales des variétés adaptées à l’ombrage : productivité, tolérance et résilience à des environnements climatiques et de production plus difficiles.

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