19.07.2024
Le CRCF, projet de cadre européen pour certifier les éliminations de carbone (‘carbon removals’), privilégie les technologies émergentes, au détriment de projets forestiers.
L'ATIBT, via sa Commission Carbone et Biodiversité, rejoint la « NBS (Nature Based Solution) Coalition » pour défendre les solutions fondées sur la nature, dont les projets forestiers, soulignant leurs cobénéfices (biodiversité, aspects sociaux, etc).
La coalition a récemment adressé une lettre ouverte aux autorités européennes pour alerter sur les impacts du CRCF pour les projets NBS, notamment dans les pays du Sud, et continue de dialoguer avec la Commission Européenne.
Le CRCF, un projet de réglementation européen pour encadrer les projets d’élimination carbone
Le projet de réglementation CRCF (Carbon Removal Certification Framework) proposée par l'Union Européenne vise à établir un cadre de certification fiable pour les éliminations de CO2 de l'atmosphère. Les objectifs principaux sont de promouvoir des solutions durables et des technologies innovantes de capture et de stockage du carbone. Ce système de certification validera les efforts d'élimination du carbone et créera des opportunités de revenus pour les industries par la commercialisation de crédits carbone auprès des entreprises européennes cherchant à compenser leurs émissions. Le cadre envisage diverses méthodologies de certification pour des activités comme le montre le schéma suivant :
Les projets hors d'Europe peuvent être éligibles au CRCF s'ils respectent les critères stricts européens. Cela permet à des projets internationaux de participer au marché européen de la compensation carbone, en garantissant une élimination réelle et durable du CO2, et un alignement avec les normes environnementales et sociales de l'UE. Le CRCF peut ainsi aider l'Europe à atteindre ses objectifs climatiques en intégrant des suppressions de carbone de diverses régions du monde tout en maintenant un haut niveau de rigueur dans la certification.
Les émissions "hard to abate" sont celles particulièrement difficiles à réduire pour des raisons technologiques, économiques ou pratiques, provenant souvent de secteurs comme l'aviation, la sidérurgie, la production de ciment, et la chimie. Dans le cadre du CRCF et des politiques climatiques européennes, leur compensation nécessite souvent des technologies de suppression de carbone comme la capture et stockage de carbone (CCS - Carbon Capture and Storage) ou la bioénergie avec capture et stockage de carbone (BECCS - Bioenergy with Carbon Capture and Storage).
Dans cette configuration, l'utilisation des crédits carbone issus de projets forestiers pose question
Le CRCF vise à établir des règles claires pour la certification des suppressions de carbone, en différenciant les suppressions permanentes et durables (« permanent carbon removals » dans le schéma ci-dessus) des autres formes, comme le "carbon farming" (dont font partie les projets forestiers) et le stockage de carbone dans les produits (piliers 1 et 2 du schéma). Les projets forestiers, bien qu'importants pour la séquestration, présentent des risques de non-permanence (déforestation, incendies, perturbations naturelles) et pourraient ne pas être préférés pour compenser les émissions difficiles à réduire, sauf s'ils démontrent une gestion et une durabilité exceptionnelle.
De fait, cette réglementation laisse entendre que les crédits carbone issus de la gestion durable des forêts et de la reforestation sont de moindre qualité que ceux générés par des technologies émergentes. Le risque est de voir les projets forestiers relégués au second plan, malgré la prise en compte de la non-permanence par les standards de certification volontaires.
De plus, il est regrettable que cette régulation considère uniquement le carbone, ignorant les cobénéfices sociaux et en biodiversité fournis par les projets de gestion durable des forêts et NBS (nature-based solutions), absents des projets technologiques de stockage permanent du carbone.
L’ATIBT rejoint « la NBS Coalition »
La NBS (Nature Based Solution) Coalition regroupe une vingtaine d’entreprises et organisations du monde entier impliqués dans des projets carbone forestier à différents niveaux.
L’ATIBT, par l’intermédiaire de sa commission Carbone&Biodiversité, se joint à cette coalition pour appeler l’Europe et les acteurs du monde économique à comprendre notamment que :
Cette coalition a récemment rédigé une lettre ouverte aux autorités européennes pour souligner les impacts du CRCF sur les projets NBS, notamment dans les pays du Sud. Cette lettre a été envoyée à la Commission Européenne et au Comité français de l'UICN. La coalition se réunit chaque semaine pour suivre les avancées de sa feuille de route et échange régulièrement avec la Commission Européenne à Bruxelles. Un mémo expliquant les enjeux du CRCF pour les zones tropicales a également été élaborée.
Partagez cette lettre aux médias, à des groupes d’experts, à des ministères des pays tiers pour porter la voix des projets forestiers !
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